Diatomées benthiques de l'estuaire de la Seine :

Port du Havre et port de Rouen

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Introduction

Les estuaires correspondent à des bras de mer pénétrant dans une vallée fluviale jusqu'à la limite supérieure où la marée provoque une élévation du niveau de l'eau. Dans les estuaires, la marée présente une composante dynamique qui correspond à la pénétration de l'onde de marée et une composante saline correspondant à l'incursion de l'eau de mer. Cette dernière se traduit par un gradient décroissant de la salinité de l'aval vers l'amont. 
Dans ces eaux, les peuplements aussi bien animaux que végétaux, doivent donc être euryhalins, c'est à dire qu'ils doivent supporter des variations de salinité de plus ou moins grande amplitude. En effet, dans les eaux saumâtres, les espèces d'origine marine ont tendance à se déminéraliser tandis que celles d'origine dulcicole ont tendance à se déshydrater. Outre les variations de salinité, les espèces présentes dans ces milieux subissent des variations de la température, de l'éclairement et des pollutions en provenance du bassin versant du fleuve considéré.

Sur la Seine, du fait de la forte amplitude des marées (environ 7 mètres), la composante dynamique se fait sentir jusqu'à 150 km de la Manche (Barrage de Poses, en amont de Rouen). La salinité (> 0,05 %) ne se ferait sentir que jusqu'à 40 km de la Manche (Vieux-Port, entre Le Havre et Rouen).
Le port du Havre et celui de Rouen accueillent des bateaux en provenance de diverses régions du monde qui peuvent introduire dans l'estuaire des espèces, animales et végétales, exogènes.

Collecte et traitement des prélèvements :

Des prélèvements ont été réalisés, certains en plongée, par Mr. Gérard Breton, aux dates et stations suivantes :

-- A :  30 janv. 2010, port du Havre, Bassin de la Barre, au ras de l'eau, filaments sur Ulva lactuca et sur Bryozoaires,
-- B : 13 mars 2010, port du Havre, quai de la Moselle, profondeur - 3 mètres,
-- C : 14 oct. 2010, port du Havre, bassin fluvial, filaments sur le fond à - 0,5 mètres,
-- D : 14 oct. 2010, port du Havre, bassin fluvial, dépot sous 5 cm d'eau,
-- E : 16 oct. 2010, port de Rouen, bassin Saint Gervais, sur le fond à environ 2 mètres sous les plus basses eaux.

Ces prélèvements ont été stockés dans l'alcool puis traités selon
Loir (2004a et 2004b ; cf Bibliographie).

Port du Havre

Composition des populations diatomiques :

L'analyse des 4 prélèvements a permis de répertorier un total de 115 taxons, appartenant à 35 genres. Seize genres sont représentés par un seul taxon. (Voir la liste des taxons)
Les genres les plus représentés  en nombre de taxons sont :

Genre Nitzschia : 22 taxons,
Genre Amphora : 15 taxons,
Genre Navicula : 13 taxons,
Genre Cocconeis  : 9 taxons,
Genre Achnanthes : 7 taxons.

Nombre de taxons et  taxons dominants dans les 4 prélèvements  :

A : 63 taxons. Achnanthes brevipes, Bacillaria paxillifer, Melosira moniliformis var. moniliformis et Navicula agnita (?).
B : 29 taxons. Haslea crucigera.
C : 20 taxons. Achnanthes brevipes, Ardissonia crystallina.
D : 31 taxons. Achnanthes brevipes.

Globalement, les espèces de diatomées marines considérées comme étant sténohalines représentent 50 % des espèces. Ce pourcentage varie dans les 4 stations entre 40 (B) et 63 % (C). Les espèces de diatomées marines euryhalines représentent 38 % de la totalité, ce pourcentage variant de 27 (C) à 50 % (B). Dix pour cent des espèces sont essentiellement des espèces d'eaux saumâtres.

Espèces exogènes : une seule espèce (deux valves observées), Amphora kolbei, ne serait pas présente sur les côtes de l'Atlantique NE et de la Mer du Nord. Elle est présente en Méditerranée et dans le Pacifique.

Quelques espèces sont présentées dans :

Le genre Achnanthes Bory de St-Vincent :

Achnanthes brevipes C.A. Agardh var. brevipes et Achnanthes brevipes var. intermedia (Kützing) Cleve sont les taxons dominants dans les prélèvements C et D. Outre ces taxons, Achnanthes parvula Kützing, Achnanthes longipes C.A. Agardh, Achnanthes javanica Grunow, Achnanthes sancti-pauli (Heiden) Kobayasi & Swatari et une espèce non identifiée, sont présents dans le prélèvement D.
Une trentaine de frustules et valves observés dans le prélèvement D présentent tous les caractères de
Achnanthes sancti-pauli (syn. Cocconeis sublittoralis Hendey)) sauf pour les densités de stries : sur l'épivalve elles varient de 5-6 à 11 / 10 microm. (diagnose : 6-8,5)  et sur l'hypovalve  de 11 à 12-13 / 10 microm. (diagnose : 5-8,5).

Port de Rouen

Composition des populations diatomiques :

L'analyse du prélèvement obtenu en octobre a permis de répertorier un total de 53 taxons, appartenant à 22 genres. Neuf genres sont représentés par un seul taxon. (Voir la liste des taxons)
Les genres les plus représentés sont :

Genre Nitzschia : 8 taxons,
Genre Navicula : 6 taxons,
Genre Caloneis : 4 taxons.

L'espèce Navicula gracilis est légèrement dominante.

Les espèces d'eau douce sténohalines représentent 50 % de la totalité et les espèces d'eau douce euryhalines 25 %. Des espèces d'eaux saumâtres et des espèces marines euryhalines constituent un quart de la totalité.

Quelques espèces sont présentées dans :
Diatomées du port de Rouen

Conclusion

Les cinq prélèvements analysés fournissent un premier inventaire des diatomées présentes en deux points éloignés de l'estuaire de la Seine.

Nous ne connaissons pas précisément les variations de la salinité dans le temps, dans les différentes stations.
Au port du Havre, du fait de l'écoulement des eaux de la Seine, la salinité fluctue au cours de l'année, autour de valeurs le plus souvent inférieures à 3,0- 2,5 %. Ces valeurs permettent la prolifération de diatomées marines les unes sténohalines les autres euryhalines, voire de quelques espèces d'eaux saumâtres.

Au niveau de Rouen, bien qu'il soit admis que l'onde de salinité n'atteigne pas, et de beaucoup, ce port, les diatomées dulcicoles sténohalines ne constituent que la moitié de la population, l'autre moitié étant constituée par des diatomées dulcicoles euryhalines, des diatomées d'eaux saumâtres et des diatomées marines euryhalines. Il serait intéressant de savoir comment varie la salinité dans le temps.

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