Diatomées benthiques des marais salants de Guérande

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Les marais salants de la presqu'île guérandaise:

Au sud-est de la Bretagne, entre l'estuaire de la Vilaine et celui de la Loire, le pays de Guérande est le résultat d'un effondrement géologique. Depuis quinze siècles les hommes ont aménagé cette zone de marais située au niveau de l'océan pour produire le sel marin par évaporation naturelle de l'eau de mer. Actuellement, les marais salants s'étendent sur près de 2000 hectares. Lors des grandes marées, à la fin du printemps, l'eau de mer est introduite par un canal (étier, bondre) dans un premier réservoir (vasière). De là, sous l'effet d'une légère dénivellation, elle s'écoule lentement dans des compartiments rectangulaires (fares et adernes) où elle commence à se concentrer, avant de se répandre sur une épaisseur de quelques centimètres dans les bassins rectangulaires (oeillets) où le sel cristallise (l'eau atteint alors une concentration de 270 grammes de sel par litre) et est récolté, au cours de l'été,  par les paludiers.
Constituant un patrimoine exceptionnel, les marais salants de Guérande sont classés depuis 1996.

Dans un ouvrage illustré de magnifiques vues aériennes, P. François nous fait découvrir ces marais où les hommes et la nature se sont unis pour créer des formes étranges, incongrues, riches en couleurs (cf.
bibliographie).
 


Les Prélèvements :

Neuf prélèvements de la surface du sédiment et  des quelques centimètres de l'eau à son contact, ont été effectués le 2 octobre 2008, soit une fois la période de récolte du sel terminée, dans un bondre, une vasière, une vasière abandonnée (sans communication avec un étier), plusieurs fares et un oeillet. La fin du mois de septembre a été pluvieuse et il n'a pas été fait de mesure de la salinité aux différents points de prélèvement.

Dilués avec environ 0,5 vol. d’eau de mer, les prélèvements ont été agités vivement et après quelques décantations différentielles pour séparer les diatomées du sédiment, les frustules ont été traités et préparés selon Loir (2004a et 2004b ; Bibliographie).

Résultats :

Le prélèvement effectué dans un oeillet ne contenait pas de diatomées. Dans l'ensemble des autres, un total de 87 taxons a été répertorié. (Voir la liste des taxons). Dans chaque prélèvement, entre 15 (fare) et 48 (vasière) taxons ont été observés.
 
Selon les prélèvements, entre 10 (vasière abandonnée) et 20 % (vasière) des taxons appartiennent à des espèces typiquement marines. Entre 40 (vasière) et 61 % (fare) appartiennent à des espèces marines euryhalines, c'est à dire, qui, selon les espèces, acceptent une salinité inférieure à 30-33 
ou une salinité plus élevée. Entre 22 et 26 % sont des espèces strictement inféodées aux milieux saumâtres, tandis que entre 0 (fare) et 13 % (vasière) sont des espèces d'eaux douces (dulcicoles) euryhalines (elles supportent des salinités non nulles plus ou moins élevées). Deux espèces dulcicoles ont été trouvées dans la vasière.

Sur l'ensemble des prélèvements, les genres Nitzschia (14 taxons) et Navicula (13 taxons) dominent. Les genres Amphora, Cocconeis et Gyrosigma
sont représentés respectivement par 5, 4 et 5 taxons.

Dans le prélèvement réalisé dans l'un des fares, un certain nombre de cellules de Nitzschia sigma et aussi de Nitzschia rigida présentaient sur la surface du frustule de fines expansions, le plus souvent en forme de batonnets, longues en moyenne de quelques micromètres. Il pourrait s'agir soit de bactéries soit de champignons.


Nitzschia  


De nombreuses espèces marines et d'eau saumâtre présentes dans les marais salants sont présentées dans diverses rubriques de ce site (voir Infralittoral de Bretagne Sud et Médiolittoral de Bretagne). Quelques autres sont illustrées dans :

Diatomées des marais salants Guérandais 1
Diatomées des marais salants Guérandais 2

Conclusion :

Etant donné le faible nombre de prélèvements et le fait qu'ils ont été effectués à une seule date, les données obtenues sont évidemment provisoires et partielles. Des prélèvements effectués entre mars et juin 1980 par Y. Rincé et J.M. Robert (cf. Bibliographie) ont montré la présence au printemps dans les marais guérandais de 55 espèces principales ; seulement 17 sont présentes parmi les 87 espèces que nous avons référencées. Dans ces milieux où la salinité et la température varient fortement tout au long de l'année, les peuplements planctoniques et benthiques subissent des variations qualitatives en même temps que quantitatives très prononcées.
Au cours de l'été, la salinité dans les vasières est de 40-45
 et dans les fares de 55 à 200 . Il est vraisemblable que lors de nos prélèvements elle était nettement moins élevée du fait de pluies antérieures, ce qui pourrait expliquer la présence d'espèces dulcicoles euryhalines.
Trois espèces euryhalines présentes au printemps ainsi que dans nos prélèvements sont remarquables (Rincé et Robert). Gyrosigma balticum et Nitzschia sigma var. sigmatella peuvent supporter des écarts de salinité de 0 à 61
 et de 0 à 96 , voire 168 , respectivement (espèces holoeuryhalines), tandis que pour Navicula ramosissima cet écart va de 20 à 96  (espèce polyhaline).


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Merci à Denis Dalbot, animateur nature à Fleur de Sel, pour m'avoir aimablement guidé et pour m'avoir fait découvrir l'agencement d'un marais salant.

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